mercredi 30 octobre 2024
Henry Muchart • Vers les neiges | Les rendez-vous du vers
Vers les neiges
Henry Muchart
Après avoir sellé les vifs petits chevaux
À la clarté d'une lanterne dans l'étable,
On part en pleine nuit, sous les seules étoiles,
À travers le village où bêlent les troupeaux.
Les sabots des chevaux résonnent sur la route,
Puis viennent les sentiers grimpant à travers bois,
Une pointe de jour a glacé le ciel froid
Et, dans l'air qui fraîchit, l'aube frissonne toute.
Les pics bouleversés d'un chaos de rochers
Sont tout roses de la lumière matinale
Et, dans le ciel plus pâle où fondent les étoiles,
Quelques flocons légers commencent à monter.
Maintenant, c'est la paix des pures Pyrénées,
À peine un cri d'oiseau passant sous le ciel lourd,
Un gave qui s'écroule avec un long bruit sourd
Et qui semble immobile au fond de la vallée.
Pour gravir les derniers sommets, on a laissé
Dans la stérilité des solitudes mornes,
Les chevaux fatigués manger l'avoine blonde
Et tremper leurs naseaux dans le ruisseau glacé.
Le bleu panorama des montagnes s'étage
Et des villages clairs s'éparpillent au loin ;
La neige, enfin ! la neige en un creux de ravin
Apparaît, vierge et pure et divinement blanche.
Et c'est d'une saveur étrange, en l'air piquant,
Sous le soleil terrible en ces roches brûlées,
De sentir des fraîcheurs de neige immaculée
Voluptueusement, vous fondre entre les dents.
samedi 26 octobre 2024
Alfred Descarries • L'hiver aux champs | Les rendez-vous du vers
L'hiver aux champs
Alfred Descarries
La neige tourbillonne, et sur la route blanche
Les grelots aux tons clairs égrènent leur chanson…
La morsure du froid fait gémir chaque branche,
Mille larmes d’argent scintillent au glaçon !…
On dirait qu’un encens s’élève de la terre
Où le sillon repose en un calme sommeil,
Et le bon paysan de sa demeure austère
Contemple son champ triste attendant le réveil !…
L’aïeul se chausse au feu d’une bûche d’érable.
Il a conquis l’aisance à force de labeurs !
Et regarde attendri les petits â sa table…
Demain… ces petits-là seront des laboureurs !…
Et pendant que la neige en flocons, grave, tisse
L’éphémère linceul de la fécondité,
L’aïeul demande au ciel qu’il protège et bénisse
Les foyers et les champs de sa postérité !…
lundi 21 octobre 2024
Édouard Michaud • Los | Les rendez-vous du vers
Los
Édouard Michaud
C'est fête au cher pays, trop longtemps méconnu
Et qui doutait, il semble, ou s'ignorait lui-même,
Et sous le pur soleil, éclatant d'azur nu,
On fait mieux qu'exalter sa splendeur verte, on l'aime.
Il est si doux. le cher pays, soit que l'étang,
Parmi les glaïeuls plats, tremble à l'air ou miroite ;
Ou qu'alerte et fuyant sa coupe trop étroite,
La source fraîche s'offre au ruisseau qui se tend.
Il est si doux quand l'avril passe et que les branches,
S'enivrant aux pommiers de son allègre appel,
Pour rendre encor plus bleu le bleu divin du ciel,
S'enveloppent du givre odorant des fleurs blanches.
Il est si doux dans ses pacages et ses bois,
Ses chemins creux où rit l'éclair bref des fontaines,
Dans l'outremer léger de ses crêtes lointaines
Et l'émail de ses fleurs où se poissent nos doigts.
Il est si fort, le cher pays, dans le tronc vaste,
Près duquel n'atteint pas l'orgueil d'or des midis,
Des châtaigniers géants, puissamment arrondis
Sur la mer des blés noirs qui les bat d'un flux chaste.
Il est si plein d'une âme triste, il est si plein
D'une âme nostalgique et qui vaut qu'on l'atteigne,
Avec ses rocs d'exil où la bruyère saigne
Et sa lande indigente où tout semble orphelin.
Doux, fort, méditatif, l'admirable équilibre !
Et se peut-il rêver sol plus humain au cœur
Que celui qui jamais oppressant et vainqueur,
Chante ou pleure avec moi, lui discret et moi libre ?
dimanche 20 octobre 2024
samedi 19 octobre 2024
vendredi 11 octobre 2024
samedi 5 octobre 2024
Joseph Rousse • Le bourg natal | Les rendez-vous du vers
Le bourg natal
Joseph Rousse
L'abeille se souvient de sa ruche natale ;
L'hirondelle à son nid revient chaque printemps ;
Mon âme, allons revoir et parcourir les champs
Où la vie eut pour nous sa beauté matinale.
J'aime notre vieux bourg au milieu des blés mûrs,
Bornés dans le lointain par la mer azurée ;
J'aime notre maison de sa treille entourée,
Avec les liserons qui grimpent à ses murs.
Voilà cette fenêtre où, les soirs de novembre,
J'entendais les pluviers passer dans le ciel gris..
Du haut de ce balcon quelquefois j'ai surpris
L'aurore souriant aux neiges de décembre.
Mon père s'asseyait au pied de ce jasmin ;
Des loriots suspendaient leurs nids dans ce grand chêne ;
Mes sœurs, en se penchant au bord de la fontaine,
Agaçaient les échos de leur rire argentin.
Quand on cueillait les fruits, je me souviens encore
De la senteur des coings parfumant le grenier ;
Nos jeunes bras pliaient sous le poids d'un panier,
Et les pommes roulaient dans l'escalier sonore.
De riants souvenirs remplissent la maison :
Voici le grand foyer et ses chenêts antiques ;
C'est là qu'on nous disait des récits fantastiques,
Devant un feu de lande, au chant clair du grillon.
Le bourg a peu changé, mais le vieux presbytère
Est tombé sous les coups du stupide marteau,
Avec son beau portique ombragé d'un ormeau
Et qui semblait gardé par deux anges de pierre.
Dans ce chemin je vis un triomphe brillant,
Plus de cent bœufs, ornés de fleurs et de verdure,
Traînant un char couvert d'une riche tenture,
Qui portait un évêque au regard souriant.
Cette maison moussue à la porte ogivale
Est celle où, dans les soirs qui précèdent Noël,
En habits de théâtre et d'un ton solennel,
Les jeunes paysans jouaient la pastorale.
Noël à cette nuit je songe avec bonheur !
On voyait scintiller dans la campagne sombre
Et s'approcher du bourg des lanternes sans nombre,
Quand les cloches sonnaient la messe du Sauveur.
L'église est toujours pauvre et ses vieilles toitures
Tremblent au vent de mer sur des murs chancelants.
J'ai reconnu les saints, le christ aux pieds sanglants,
Les tableaux, les autels aux gothiques sculptures.
J'aurais aimé goûter un jour le vrai repos
Sous l'odorant fenouil, auprès de cette église ;
Mais on dit que les morts ont corrompu la brise,
Et dans un champ lointain on va porter leurs os.
vendredi 4 octobre 2024
Aurélien Ridon du Mont aux Aigles • Le fenil | Les rendez-vous du vers
« Le fenil », poème n°157 de mon ouvrage n°1. 206ème poème publiable. Poème en pentadécasyllabes, vers que j'ai maintes fois utilisés dans mon ouvrage n°1, se lisant sur un rythme de 7//8.
Poème « de jeunesse », ou disons plutôt poème des débuts de mes écrits agrestes. Rien d'exceptionnel ; je le publie ici par « variété », et pour dévoiler de quel suc était faite ma plume de cette époque (pas si lointaine, 2020).
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